LES TOURS MUTILÉES DE VERDUN


198ème semaine

Du lundi 13 au dimanche 19 mai 1918

Ce blog se poursuit sur un double plan temporel :
- avec une correspondance exacte de cent ans pour les Anduziens
- avec une chronologie reprise depuis le début 1914 pour les Tornagais

LA VIE EST ASSEZ PÉNIBLE

Marcel BASTIDE
Caporal au 3ème Régiment d’Infanterie
Mort le 28 mai 1918 dans le secteur d’Hassoule (Meuse)


Marcel BASTIDE est né le 8 janvier 1890 à Tornac, de César et d’Elize-Nelly née Desmons. Il est garçon de ferme. Il est incorporé dans le 3ème Régiment d’Infanterie le 8 octobre 1911, libéré le 8 novembre 1913. Mais il est évidemment rappelé dès le 2 août 1914. Il semble avoir été affecté en 1916 au camp de prisonniers de Carpagne, près de Marseille. Il est nommé caporal le 23 mai 1918, cinq jours seulement avant d’être tué.

Historique du 3 RI :
« En août 1914, au moment de la mobilisation générale, l'E. M. du Régiment, les 1er et 2e Bataillons sont en garnison à Hyères, le 3e Bataillon vient de rejoindre sa garnison de Digne, rentré brusquement des manœuvres alpines, que les événements européens ont interrompues.

Le 3e RI fait partie du XVe Corps d’Armée. En très grande majorité, il est composé de Provençaux, parmi lesquels dominent les Bas-Alpins et les Marseillais, qui, en outre, constituent presque exclusivement l'appoint en réservistes que la mobilisation apporte au Régiment.

Commencées le 2 août, les opérations de la mobilisation se continuent les 3 jours suivants, dans l'ordre le plus parfait. Tous, hommes de J'active et réservistes partagent l'enthousiasme et la résolution générale qui animent notre pays pacifique brusquement et brutalement attaqué par l'ennemi héréditaire.

Dans la matinée du 6, deux trains quittent Hyères et un train Digne, transportant le Régiment vers la frontière de Lorraine, où s'effectue la concentration de la 11° Armée, dont le XVe Corps d'Armée fait partie. Le voyage à travers la France n'est qu'une longue marche triomphale. Au passage des acclamations nourries saluent les trains qui s'arrêtent à Diarville (Meurthe-etMoselle) dans la nuit du 7 au 8 août.

Le débarquement s'effectue aussitôt, et dès le lendemain, la progression commence dans la direction du NE, vers la Lorraine annexée. La chaleur accablante, dans un pays dénudé et accidenté, rend extrêmement pénibles les premières étapes, sans qu'en soit diminués l'entrain et le moral de tous maintenu excellent et exalté par les premières nouvelles souvent plus optimistes que véridiques qui circulent parmi les troupes. Nos premiers succès en Alsace sont accueillis avec enthousiasme ».

Mais les premières batailles de Lorraine sont un revers pour les Français. Le XVème Corps est violemment attaqué, il se replie en désordre.

« Le Régiment est rallié et vient bivouaquer à l'Ouest de Coincourt. 15 Officiers, 736 hommes étaient tombés sur ce premier champ de bataille. L'assaut avait été mené à découvert et à faibles intervalles. La tenue de nos hommes, celle de nos Officiers surtout, en faisaient des cibles excellentes. Les actes de courage et de dévouement de ce premier combat sont nombreux.

Sous la pression de l'ennemi, le mouvement de recul continue le lendemain matin : la forêt de Vitrimont est rapidement franchie, la Meurthe est traversée à Blainville dont les ponts sautent derrière nous. Enfin, dans la soirée du 22, le mouvement de repli qui n'a cessé de s'exécuter dans le meilleur ordre est arrêté sur les hauteurs de Saffais, à l'Est de la Moselle, à l'abri des ouvrages de défense organisés antérieurement par des formations de réserve.

La retraite de la 1ère Armée a été générale. Elle ne saurait être imputée au courage des troupes, qui de Morhange à Sarrebourg se sont héroïquement heurtées à un ennemi infiniment supérieur en nombre, nous attendant sur un terrain savamment préparé et à une très puissante artillerie lourde que nos batteries de campagne et le nombre infime de nos pièces lourdes n'ont pu réduire au silence, malgré leurs sacrifices sanglants ».

Dès le lendemain, le 3 RI se replie et va prendre part à la Bataille de la Marne, qui stoppe l’avancée allemande. Ensuite c’est le parcours normal d’un régiment d’infanterie au cours de ces sombres années : 18 mois de stationnement sur la rive gauche de la Meuse, entre Verdun et Vauquois, avec toutes les batailles que cela représente. Longue et pénible vie des tranchées. Puis c’est la Belgique, autour de Nieuport (avril à octobre 1916) et de l’Yser, la Somme (octobre à décembre 1916), les Flandres (janvier 1917 à mars 1918). Dans ce dernier espace, le 3 RI a perdu 24 officiers et 952 hommes.


Puis c’est le retour à Verdun, entre mai et septembre 1918.

Suite de l’historique du régiment :
« C'est dans la vallée de l'Ornain à Ligny-en-Barrois et dans les environs, que se repose, se recomplète et se reconstitue le Régiment éprouvé. Ce repos se signale par son agrément et par sa brièveté, puisqu'il ne dure que 8 jours, du 22 au 30 avril. Le 30 et les jours suivants, une fois de plus, nos poilus remontent dans les wagons. Cette fois, le trajet n'est pas long. Après quelques heures de route, les vétérans du Régiment reconnaissent les tours mutilées de la cathédrale de Verdun. Dans la soirée du 1er mai le 1er Bataillon monte en ligne dans le sous-secteur de Bezonvaux. Successivement dans ce secteur, puis aux Caurières et enfin devant Beaumont pendant près de 4 mois en tout, le 3e occupe cette région dévastée où vint se briser au printemps 1916 la plus formidable ruée allemande.

Le secteur est assez tranquille (14 tués, 82 blessés dans les 4 mois), mais monotone. Les repos dans des sapes humides au fond des ravins escarpés et désertiques manquent de charme. En première et deuxième ligne, la vie est assez pénible. Les heures de travail sont longues car il s'agit de réaliser sur le terrain les G. C. (groupes de combat). Partout, l'ennemi cède, lentement sans doute mais sûrement. Parfois, il fait encore durement face, mais son organisation craque. Un dernier effort de tous et il sera bouté hors de notre sol ! A cet effort ultime le Régiment s'attend et il s'y prépare ! Pour tenir en haleine gradés et hommes, chaque nuit des groupes sortent en avant de nos lignes, avec il est vrai, plus de courage que de résultats, les postes d'un ennemi très dilué ne se souciant pas de tomber entre nos mains et se repliant ».


C’est au cours de ces combats à la fois continus et sporadiques que meurt le 28 mai 1918 le caporal Marcel BASTIDE.

Le bois et le ravin d’Hassoule où il trouve la mort se trouvent à l’ouest de Bezonvaux, environ 10 km au NO de Verdun. Bezonvaux fait partie des villages disparus de cette guerre.

Les restes du village disparu de Bezonvaux
Marcel BASTIDE figure sur le Monument aux morts et sur le Livre d’Or de Tornac.

A suivre…